REVUE DE PRESSE – Chienne de vie * Life is a bitch*
L’HUMANITE / Juillet 2015 « Les échos du Festival Off d’Avignon »
Une sélection de spectacles du OFF recommandés par les envoyés spéciaux de l’Humanité au festival d’Avignon :
« Chienne de vie / Life is a bitch » au Théâtre des Carmes, du Collectif Le Bleu d’Armand.
Coup de fraîcheur aux Carmes. (…)
Cet été, les « Carmes » ont été pris d’assaut pour des créations. (…)
La surprise des surprises est venue de « Chienne de vie», joué par quatre jeunes gens d’un collectif « Le Bleu d’Armand ».
Argument : la « tournante » du bouc émissaire.
Métaphore : la raclée comme dialogue.
Forme : un rodéo.
Dans la canicule, la fraîcheur n’est pas que dans la climatisation.
Charles Sylvestre
IO GAZETTE – LA GAZETTE EPHEMERE DES FESTIVALS / Juillet 2015 « Insolence(s) »
Qui a dit que la bien-pensance avait définitivement balayé l’insolence ? Que l’incorrect avait été banni de la société, comme l’offense ? Oui, l’offense : celle qui n’est pas timide, qui n’est de nul autre parti que celui de la liberté et de la tolérance. Elle a encore sa place, quelque part. Dans l’art et le spectacle, assurément.
« Les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît.» Sauf que la limite est fine, à défaut d’être poreuse, entre la connerie et l’audace. Audiard le savait, le collectif Le Bleu d’Armand aussi.
Avec son « Chienne de Vie / « Life is a bitch », il en fait la démonstration. II s’engouffre dans les possibles de l’insolence et de l’humour noir, brandissant la satire ou le grotesque du cynisme comme armes du rire.
Une heure durant, les quatre compères explorent, avec énergie et plaisir, les travers des relations humaines, souvent dévoyées (constatent-ils) par une quasi-impossibilité à coexister. Par le jeu et par une succession de sketches filés, cadencé par des chansons créées par la compagnie, habilement séquencé par des ruptures de rythme inattendues, le spectacle dénonce autant l’habitude collective du « bouc émissaire » que la béatitude niaise de l’« aimez-vous tous ». « Chienne de vie » peut cependant dérouter par sa franchise, son outrance. Mais si chacun se laisse aller à rire de l’odieux, avec distance et second degré (au moins !), l’heure est agréable : tolérez alors qu’on y accumule les humiliations. les insultes, les coups, le rabaissement le harcèlement ou les blagues sur les communautés (juifs, Arabes, handicapés, homosexuels…). Acceptez aussi qu’on pousse le vice jusqu’à danser sur du Patrick Sébastien.
Rien de prétentieux, rien d’autre qu’une spontanéité qui, sous couvert de guignolades entre amis, interroge les rapports humains, sans candeur ni sadisme, mais avec l’intelligence de celui qui ose l’ignoble pour le dénoncer en même temps qu’il s’en amuse.
Rick Panegy
IO GAZETTE – LA GAZETTE EPHEMERE DES FESTIVALS / Juillet 2015 « Un théâtre qui agit »
Le principe est simple. Il est même primitif : jouer, distribuer des rôles, désigner le bouc émissaire. Non pas le choisir mais le tirer au sort : absurdité de l’arbitraire.
C’est le public qui fait ce geste et détermine lequel des quatre comédiens endossera ce rôle et encaissera les «coups ». Puis tout s’enchaîne. Les comédiens prennent leur fonction et passent en revue, donnent à voir, les situations de vie où le couple bourreau/victime s’incarne. Violence physique et morale faite à un individu à qui l’on demande même de s’excuser d’être cette victime.
Et dans ce petit jeu tout le monde est impliqué. Pas de «témoins » pas de spectateurs, puisque ce sont eux qui ont désigné la victime. Les comédiens n’en sont d’ailleurs pas vraiment, qui jouent et s’interpellent par leurs vrais prénoms. Aujourd’hui, c’est leur collègue « Nolwenn » qui est la victime, et ils lui donnent des claques en leur propre nom.
Le collectif Le Bleu d’Armand propose ici un théâtre du ressenti et démontre par le corps plus que par le discours. En contant, en comptant les lieux où s’actualise ce couple d’enfer structurant les rapports humains, les comédiens tentent de circonscrire la situation. Et donc de la contenir. C’est un théâtre qui agit : dire et faire ensemble, comme un principe rituel. La scénographie, superbe, est organique et matérielle :1800 litres de tourbe blonde recouvrent le plateau. La matière est concrète et souligne la performance au sens d’action.
Régulièrement, les comédiens interpellent le public, lui jettent un coup d’oeil ou le fixent un instant, comme pour s’assurer de sa présence totale. C’est un regard qui cherche le complicité. C’est un regard qui vérifie aussi que tout le monde garde les yeux ouverts jusqu’au bout, jusqu’à l’insupportable. Le processus est en cours.
Guislaine Foiret.
JOURNAL DE SAÔNE-ET-LOIRE / Janvier 2015 « Chienne de vie : une comédie percutante »
Une centaine de personnes étaient présentes au C2, samedi soir, pour la création Chienne de vie du collectif rhodanien Le Bleu d’Armand. Le spectacle a commencé par le tirage au sort d’un bouc émissaire parmi les quatre comédiens. Alors coiffé d’un bonnet d’âne, commence pour lui toute une série d’humiliations physiques et morales, à travers des scènes effroyablement familières. Car ce que dénonce la pièce, c’est la violence ordinaire du plus fort sur le plus faible, du directeur sur l’employé, du riche sur le pauvre, le racisme, le sexisme, l’homophobie, la xénophobie… mais aussi l’esprit grégaire qui peut pousser à exclure et à anéantir une personne par surenchère au sein d’un groupe. Chacun peut se reconnaître, mais sans doute pas dans ce qu’il a de meilleur en lui. Les comédiens interrogent, non sans humour, les parties les plus sombres de l’âme humaine et de l’humanité. Ils ont été longuement applaudis. La soirée s’est achevée par une rencontre entre la troupe et les spectateurs, autour d’un verre… de l’amitié.
Isabelle Descloux.
L’HEBDO LE COMTADIN (TTT) / le 25 Juillet 2013
Retour sur la dernière représentation. On nous accueille, on nous sourit, on nous invite à nous installer, on nous demande si « Ca va? ». Mais on sent déjà que le fait de s’asseoir, c’est accepter quelque chose et que cette chose nous est pour le moment inconnue. Quatre comédiens. Un tirage au sort qui décidera qui jouera le bouc-émissaire. Ce soir-là, une poignée de spectateurs venus plusieurs fois décident, en bourreau volontaire, et tout le monde suit : Ju-lien ! Ju-lien ! Sans savoir dans quoi ils l’entraînent… Après tout, ceci n’est qu’un jeu, on est au théâtre, non ? Alors amusons-nous. La complicité qui lie alors les comédiens permet à toute la haine et la bêtise humaine de prendre corps sur le plateau. Le jeu est tellement fort qu’on se demande parfois s’ils ne dérapent pas. Enfin une pièce comme un cri de rage, brut et universel. Le public « se sent devenu chose, de par l’action-même de la force qu’il a déchaîné » (M. Vinaver).
M.P.
LES HUMEURS DE LA GRENOUILLE Théâtre Les Bambous / le 25 Juillet 2013
Chienne de vie* *life is a bitch. De nouveau, une création collective. De nouveau, l’énergie dévastatrice des quatre Armand, (Anna Pabst, Nolwenn Le Doth, Zoé Agez-Lohr… et Julien Perrier), qui ne sont plus des bleus, mais des pros de la peinture au vitriol de tout ce qui nous pousse à trouver un bouc émissaire*, pour ne pas dire quoi? Que la vie est rude, que le travail est pénible, que la famille est envahissante, et que tout ça c’est de la faute à qui ? pas à moi, non, à lui. Parce qu’il est étranger, roux, handicapé, arabe ou féminin, qu’importe, c’est de sa faute…jusqu’à ce que je sois moi-même pointé du doigt, sans rémission ni espoir de s’en sortir mieux que les précédents… à moins que . A moins que le rire dévastateur ouvre les consciences comme il dilate les zygomatiques. A moins que la réflexion s’immisce même à notre insu entre deux volées de mots bien sentis. A moins qu’on n’en puisse plus d’entendre ce qui peut apparaître au premier abord comme une vaste saloperie insupportable, et qu’on quitte la salle très fâché, en pensant que ce qui est exposé là est non pas un réquisitoire, mais une profession de foi…mais c’est bien mal entendre, c’est bien mal écouter que de penser que ces 4 là puissent adhérer, même une seconde, à ce qu’ils dénoncent. D’une façon outrée et corrosive, certes. Mais avec aussi une large dose de poésie et de tendresse, qui fait qu’on les aime de nous maltraiter si habilement, et qu’on en redemande.
Ziza Pillot.
* l’artiste qui ignore qu’il est un bouc émissaire, que son devoir est d’aimanter, d’attirer, de faire tomber sur ses épaules les colères errantes de l’époque pour la décharger de son mal-être psychologique, celui-là n’est pas un artiste. Antonin Artaud
THEATROTHEQUE (TTT) / le 8 Juillet 2013
Patchwork théâtral autour d’un bouc émissaire…